samedi 19 décembre 2009

Le bon, la brute et le truand


       C’est avec quelques heures de retard que le clap de fin du sommet de Copenhague a retenti. Pourtant si de nombreux chefs d’États ont quitté le Bella Center aux alentours de 22h, tout n’était pas terminé à l’intérieur. Les délégations ont poursuivi leurs discussions dans la nuit pour régler les derniers détails … du compromis trouvé à Copenhague. Depuis quelques semaines, certains craignaient déjà que la conférence ne débouche que sur un accord politique. Les pessimistes n’ont donc pas eu raison. En effet, le résultat est encore pire que ce qu’il prévoyait : Un compromis. Car pour devenir accord, ce compromis doit encore être présenté en séance plénière pour être adopté par consensus. Décevant donc, d’autant que réunir l’accord de tous ne sera pas chose aisée puisque de nombreux pays ont déjà signalé leur refus de signer un tel accord, en raison de la faiblesse de ce dernier.

       Cet accord commence pourtant très fort avec une magnifique déclaration. Un rappel au monde, que la lutte contre le changement climatique est un des plus grand défi de notre temps. Pour répondre à ce défi le choix est fait de faire figurer sur le compromis que l’objectif est de limiter le réchauffement à 2°C. Ceux qui espéraient une limite de 1,5°C seront donc déçus dès la 5ème ligne de l’accord, mais qu’ils se rassurent le pire est à venir.

       Selon le texte, le pic des émissions doit être atteint le plus rapidement possible. Mais il est immédiatement rappelé que ce pic sera plus long à atteindre dans les pays en développement, car il convient de garder en mémoire que pour les pays en développement éradiquer la pauvreté est une nécessité. La priorité n’est donc pas donnée à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de ce fait, même si cela fut longtemps envisagé, l’accord ne fixe finalement pas d’objectif de réduction de gaz à effet de serre pour l’horizon 2050 (alors que les experts misent sur une réduction de 50% pour atteindre l’objectif de 2°C). Il appartiendra en revanche aux états d’annoncer avant le 1er février 2010 leurs objectifs de réduction pour l’année 2020. En ce qui concerne le contrôle, les pays de l’annexe 1 qui ont ratifié le protocole de Kyoto demeurent liés par leurs engagements et de ce fait par le contrôle prévu par le protocole (contrôle que l’on ne peut pas vraiment qualifié de contraignant). Pour les pays qui ne sont pas dans l’annexe 1, ils leur appartiendra de faire le bilan de leurs efforts et de le rapporter aux Nations Unies tous les deux ans. Un contrôle que l’on ne peut pas non plus qualifier de contraignant d’autant plus que le texte garantit le respect de la souveraineté nationale.
       On est donc bien loin de l’ambition notamment française de créer une Organisation Mondiale de l’Environnement et d’une Cour qui contrôlerait le respect des engagements.
       En conclusion de ce volet réduction des émissions de gaz à effet de serre, on peut donc dire que les états sont d’accord sur la nécessité de limiter la hausse de température à 2°c, mais ne s’engagent pas à y parvenir.

       En ce qui concerne le volet financier, il est bien sûr contesté par beaucoup, pourtant ce n’est pas le point le plus décevant de l’accord, tout du moins en ce qui concerne son montant. Ainsi, l’accord fait référence à une aide à court terme de 30 milliards de dollars pour la période de 2010 à 2012 et de 100 milliards de dollars par ans à partir de 2020.
       Enfin, le texte fait référence comme on l’avait évoqué il y a deux jours, à l’importance de lutter contre la déforestation par le biais d’un mécanisme de financement de la protection des forêts tel que REDD+.

       Conscients de la faiblesse de leur accord et surtout de l’absence d’effets contraignants, de nombreux dirigeants ont déjà prévu de se revoir à Bonn "dans six mois" selon Angela Merkel, afin de préparer la prochaine conférence sur le climat de Mexico, fin 2010.
       Peut-on pour autant se réjouir d’une nouvelle conférence ? Si l’accord de Copenhague est décevant, les réactions de certains de ses acteurs le sont encore davantage. Dès lors, que peut-on espérer d’une prochaine conférence qui réunira sensiblement les mêmes acteurs ?
       En effet, pour tous ceux qui avaient placé tant d’espoir en Copenhague, cet accord est un fiasco. L’union Européenne a bien évidemment déclaré que l’accord était en dessous de ses ambitions, ce qui devrait d’ailleurs l’amener à hésiter encore longtemps sur ses objectifs pour 2020 (l’UE faisait référence à 20%, mais n’excluait pas un objectif de 30% en cas d’accord encourageant). Pour autant cet accord à minima ne semble pas déplaire à tout le monde. Les États Unis et la Chine ont passé 2 semaines à se faire la guerre et aux yeux de bons nombres de parties, ont contribué à l’échec d’un accord plus conforme aux nécessités environnementales. Dès lors, on comprend mieux la déclaration du négociateur chinois qui, à contrecourant du reste de la planète, parle d’un résultat positif et souligne même que tout le monde devrait être heureux…
       En revanche, on a du mal à cerner la réaction de M. Obama qui juge le résultat «insuffisant » pour lutter contre le réchauffement climatique mais qui présente l’accord comme "une première étape importante". Ainsi, selon la déclaration américaine : "Aucun pays n'est pleinement satisfait » mais il s’agit « d’un pas en avant historique et significatif et une base à partir de laquelle il faudra progresser encore". On a donc du mal à comprendre la référence à « un pas en avant historique », surtout de la part d’un pays qui a fêté les 50 ans du « petit pas pour l’homme mais du bond de géant pour l’humanité ». Nul doute que M. Armstrong appréciera la comparaison entre sa promenade lunaire et un accord aussi décevant que celui de Copenhague.

       C’est donc sur ce compromis à l’avenir lui même compromis par le refus de certains États à l’accepter, que se sépare les nombreuses ONG et les militants qui auront porté jusqu’au Danemark la vague d’espoir de toute la planète. Malheureusement leurs actions n’auront pas suffit. L’Hopenhagen, s’est transformé en Flopenhagen. On se faisait déjà tout un film d’un accord contraignant, mais à la vue des déclarations de certains dirigeants, il semblerait bien que le seul film joué à Copenhague pendant ces 15 jours aura été « le bon, la brute et le truand », je vous laisse faire le casting. Comme disait Coluche, « Con promis… chose due ».

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