lundi 29 novembre 2010

Le thon de Méditerranée continue malheureusement de voir rouge…


Retour sur les résultats d’une réunion extraordinaire, déterminante pour éviter l'effondrement du stock et protéger l'avenir du thon rouge.


La Commission Internationale pour la conservation des thonidés dans l'Atlantique (Cicta, Iccat en anglais), qui compte 48 membres, s’est réunie à Paris du 17 au 27 novembre 2010 pour fixer les futurs quotas de pêche alloués aux thoniers méditerranéens - principal et récurrent point d'achopement entre écologistes et pays pêcheurs.

Le dernier avis du comité scientifique de la Cicta, estime qu’un maximum de 13 500 tonnes de captures laisserait une probabilité de 63 % à la population de thon rouge de se reconstituer d’ici à 2022. Pour relever à 80 % la probabilité de sauver le thon rouge, les quotas de pêche ne devraient pas dépasser 2 000 tonnes.

Or, les membres de la Cicta se sont finalement accordés sur un quota de 12900 tonnes pour 2011, contre 13 500 tonnes cette année ! Bien loin donc de ces chiffres, mais aussi de la réduction drastique de la pêche de cette espèce en danger (autour de 6000 tonnes) que réclamaient certains Etats et ONG.

Une décision a minima que Greenpeace a dénoncée comme étant "déplorable ", dans la mesure où ce chiffre ne laisse qu’environ 30 % de chance au stock de se reconstituer d’ici à 2020, alors que la communauté internationale s’est engagée à ce que tous les stocks de poissons soient exploités de façon durable à cette date, lors de la récente Convention internationale sur la biodiversité à Nagoya .

Les captures illégales : un fléau pour cette espèce menacée.

En effet, l’enjeu autour des stocks de thon rouge réside essentiellement dans les captures illégales, qui supplantent les quotas. La France, ainsi que neuf autres pays, maquilleraient les chiffres des captures de thons afin d’alimenter un marché noir particulièrement lucratif, dominé par le Japon, évalué à près de 4 milliards de dollars entre 1998 et 2007.

Bruno Le Maire et les pêcheurs français sortent perdants.

Depuis le début des négociations, la France, par la voix de son ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Bruno Le Maire, a défendu une position maximaliste sur le quota global de pêche au thon rouge. Elle a entraîné avec elle toute l’Union européenne. La France, dont les thoniers avaient dépassés le quota de pêche de plus de 100 % en 2007, espérait ainsi se voir accorder un délai pour le paiement de sa dette : 1 500 tonnes de poisson à retirer de son quota en 2011 et 2012. Or cette demande française a été rejetée, les thoniers n’étant en effet autorisés à pêcher « uniquement » quelque 1 000 tonnes de poisson, sur les 2500 tonnes de quota français normalement alloués pour 2011.

Pourtant, si l’UE veut respecter l’engagement qu’elle s’est fixé de « reconstituer un stock durable pour 2020 », le seul moyen d’y parvenir serait de « cesser la pêche », selon Roberto Mielgo Bregazzi, Directeur du cabinet indépendant Advanced Tuna Ranching Technologies.

Le problème des données scientifiques trop peu fiables pour évaluer les stocks.

Fournies par l’industrie de la pêche, ces données sont incomplètes et ne permettraient pas d’évaluer correctement l’état du stock. Le président de la Cicta, qui a pourtant mis en place un système de suivi de chaque thon rouge, le reconnaît, il reste des efforts à faire. Il propose d’ailleurs la mise en place d’un suivi électronique de chaque thon rouge capturé, dont les données seraient accessibles à tous.


L’objectif de reconstitution du stock thon rouge d’ici 2015 fixé lors du sommet de Johannesburg en 2002 est aujourd’hui clairement inatteignable.

Ce cas très concret du thon rouge montrerait t-il donc que les engagements internationaux, tels celui de Nagoya, ou la directive européenne sur la stratégie marine sont condamnés à ne pas être appliqués ?
Et la France n'adopte t-elle pas ici une posture contradictoire avec ses engagements pris dans le cadre du Grenelle, et son soutien à l’inscription du thon rouge en annexe 1 de la Cites en mars dernier?

S.G.

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